Les transports en commun, une horreur. Des gens partout, aucune place pour s'installer confortablement et les passagers payaient plus chers et attendaient plus longtemps pour atteindre leur destination. Le manque de place et la perte de temps mettaient tout le monde sur les nerfs, rendant le voyage désagréable. D'un point de vue confort, le train n'était pas le meilleur moyen de transport. De plus, les billets n'étaient pas donné, même pour cinq petites minutes de trajet. Dépenser dix dollars pour aller d'un point A à un point B, à peine séparée par deux ou trois kilomètres, ça n'était pas à la disposition de tout le monde. Pour couronner, le tout, les employés qui usaient du train pour aller au travail perdait vite leur emploi vu les retards que prenaient ses engins sur rails. Mais d'un point de vue écologique, il évitait les embouteillages dans les grandes rues et l'utilisation de nombreuses machines polluantes. En tout cas, c'était le seul point positif. À part avoir un rôle presque égale à une boîte de thon sur roues, il n'y avait pas d'autres avantages. Enfin bref, Pandora s'en fichait royalement.

Perdue dans ses pensées, elle ne s'occupait pas des personnes qui l'entourait. Assise sur un vieux siège miteux, elle pensait, réfléchissait. Les sourcils froncés et le regard vide, beaucoup de passagers la regardaient, interloqués mais n'osant pas lui demander ce qu'elle avait. La jeune femme sentait un mal la ronger de l'intérieur. Quelque chose la tourmentait et justifiait sa négligence physique. Les cheveux ternes, le visage pâle et dénué de maquillage. La fatigue avait tiré ses traits, la vieillissant. Depuis plusieurs jours, elle s'enfermait chez elle, consultant sans cesse les dossiers de chaque personne faisant partie de l'organigramme de son trafic. Un mauvais pressentiment la poussait à éplucher ses feuilles, comme ci la réponse à ce mal aise se trouvait entre les lignes d'un document. Sa force faiblissait de jour en jour à force de passer ses nuits à chercher la solution à son problème. Ses injections jouaient aussi un rôle. Son espérance de vie avait diminuait à une allure impressionnante. Pandora n'hésitait pas à faire des analyses dans son laboratoire, chaque jour. Les résultats n'étaient jamais bon.

La voix féminine et monotone résonna dans la wagon, annonçant à la jeune femme qu'elle était arrivée à destination. En sortant du train, elle inspira un grand coup. L'air polluée de Gotham s'infiltra dans ses poumons. Son odorat localisa une vieille odeur de tabac, accompagnée du goudron mouillé et de l'usure de la ville. Des énormes nuages gris recouvraient le ciel. En suivant la direction inverse de leur avancée, il était facile de constater que ces nuages n'étaient pas naturels. Les usines de la ville tournaient jour et nuit, salissant Gotham. De ça aussi, elle s'en moquait. Pandora s'inséra dans la foule, se créant un chemin pour fuir ce monde. Son agoraphobie ne l'avait pas quitter. Les lieux publics et les grandes cérémonies, ce n'était pas sa tasse de thé. En aucun cas, elle ne se rait sortie de chez elle. Les gens se bousculaient, chacun étant pressé pour des raisons diverses et variées. Le monde marchait ainsi et cette situation en désespérait plus d'un. De longs soupirs se firent entendre, des cris et des pleurs d'enfants, des appels à l'aide, des sifflements, et bien d'autres bruits nocifs. Prise de colère, elle accéléra le pas jusqu'à l'autre côté de la rue, moins bondée, pour y rejoindre une voiture familière.

Une fois à bord, Théodore ne démarra pas immédiatement. Il se tourna vers la jeune femme et l'observa. Cet état second l'inquiétait énormément et il ne pouvait supporter que la fille de ses maîtres adorés soit ainsi, aujourd'hui. Il voulait l'aider mais les moyens lui manquaient ainsi que la forme. Son âge avancé ne lui permettait que de faire la morale à la petite Héléna et lui donner des conseils. La clé tourna et le moteur ronronna, s'engageant dans la circulation. Le majordome n'eut pas besoin d'ouvrir la bouche pour faire parler Héléna. Cette dernière toussota et alluma une cigarette, ouvrant légèrement la fenêtre, craignant étrangement ce qui pourrait intervenir suite à cette action.

« Je regrette cette sortie, mon ami. Nous aurions mieux fait de faire une partie de scrabble au coin du feu en buvant à la santé de mes parents. »

Théodore lâcha un petit rire et activa le clignotant pour tourner dans la rue perpendiculaire à l'axe principale. Héléna agissait en tant que telle en présence de son majordome. Il l'avait vu grandir, il l'avait éduqué et ça, elle ne l'oubliera jamais. Parfois, il lui arrivait de regretter certaines décisions, certains faits, se disant que ce n'était pas digne de l'apprentissage que lui avait fourni Théodore. Mais cet homme l'avait toujours soutenu, depuis son exil au Canada jusqu'à son retour à Gotham, en passant par son internement et ses projets trop ambitieux. Il la regarda par le biais du rétroviseur et l'invita à continuer.

« Je n'ai trouvé aucune information supplémentaire sur ce Carlo Dacosta. Même sous menace, je n'ai rien obtenu de plus que tes recherches déjà bien poussées sur cet homme. Peut être que je deviens paranoïaque, que mon actuelle faiblesse me fait craindre la moindre personne de mon entourage... »

Elle expira, relâchant un flot de fumée puis laissa échapper un sourire, voulant rassure son vieil ami.

« Cependant, je suis persuadée que quelqu'un me veut du mal. Un espion dans la maison ? Possible. Pardonne de ne pas être à table ce soir, j'ai besoin de mieux étudier le problème et je suis sûrement sur la piste d'un antidote. Je savourerai, cependant, bien un de tes plats qui sont toujours aussi bon, même avec le temps. »

Arrivée au manoir, Héléna se tourna vers Gotham, brillant de tout feux. La vue dont elle privilégiait n'avait pas de prix. Mais elle ne savait plus savouré ces petites choses. D'un pas chancelant, elle se dirigea vers la porte d'entrée qui lui tenait Théodore. Soudain, elle bascula. Le majordome la rattrapa de justesse, l'installant au sol. Elle n'avait plus la force, son état empirait de jour en jour et rien ne pouvait la sauver. Pris de panique, Théodore courut chercher une paire de béquilles et aida la jeune femme à se redresser. Pandora laissa couler une larme, abandonnant l'idée de s'enfermer dans son sous-sol. Son ami le comprit vite et l'installa dans la salle de séjour, près du feu qui pétillait, projetant de petites flammes. Avant même d'avoir bouger quoi que ce soit, un tas de feuilles se présenta sur la table basse. Un petit sourire effaça rapidement l'expression de douleur du visage de la jeune femme qui attrapa la tasse de thé qui lui tendit Théodore. Jamais elle ne saurait comment le remercier de tout ce qu'il faisait pour elle. Sachant ce qu'elle avait fait et son histoire, il aurait pu partir et la laisser seule mais un lien très fort le liait à la famille Manson et si il le pouvait, il n'hésiterait pas à se charger des futurs descendants. Silencieusement, il se retira, laissant sa protégée seule.

Le tas de feuilles diminua d'heure en heure, analysait mot pour mot par le regard concentré de Pandora, remettant ses lunettes de vue en place, de temps à autre. Les trois quarts de son organigramme avait été étudié dans les moindres détails. Le cas sur lequel s'attardait la jeune femme était des plus étranges. Une jeune femme, du nom de Yun Osaka. Le déclic se fit immédiatement. Une inconnue, peu d'informations. Enfin, la solution était là. Cette femme, elle la connaissait, elle l'avait déjà vu. En tant que sbire d'un de ses concurrents. La mafia japonaise l'espionnait donc. Il était vrai qu'un petit conflit s'était crée entre Pandora et cette organisation sur le sujet des territoires de Gotham. Cependant, l'influence d'une femme telle que Pandora était dure à esquiver. La volonté de dominer la trafiquante était à ce point violente ? Au point de s'introduire dans sa « maison » et de la détruire de l'intérieur. La rage monta. La colère montait dangereusement en elle et l'envie de retrouver cette femme et de la tuer apparut brutalement. Sa tasse de thé tomba sur le tapis ancien et un bruit sourd se diffusa dans la demeure.

Le premier réflexe fut de courir dans la cuisine, dire à Théodore de fuir, d'aller se réfugier dans les sous-terrains de la maison. Une mauvaise surprise l'attendait. Le corps de son majordome était allongé sur le sol, inanimé. Surprise mais en colère, elle leva les yeux vers la seconde personne debout, présente dans la pièce.

« Il est juste endormi. »

Yun Osaka. Il fallait qu'elle se montre le jour où Pandora découvre qui est la taupe. Rien ne pouvait l'empêcher de tuer cette femme, de la pourrir et de lui faire ressentir le mal qu'elle a ressenti durant tous ces jours. Elle sauta sur la japonaise, la plaquant violemment au sol. Cette dernière expulsa la jeune femme contre le plan de travail de la cuisine, brisant de la vaisselle au passage. Le sérum. Il lui fallait le sérum. Mais pour cela, elle devait fuir. L'asiatique tenait fermement une lame dans ses mains et Héléna savait pertinemment qu'elle n'allait pas tenir face à une femme armée. Difficilement, mais sûrement, elle se redressa, visualisant au passage, un paquet de farine. Dans un élan d'espoir, elle le jeta sur Yun, avant de prendre la fuite, jusqu'à son laboratoire. Sa forme physique laissait à désirer et risqua de la faire chuter plusieurs fois dans sa course. Arrivée au niveau de sa chambre, elle baissa la poignée mais la porte ne bougea pas. Son visage exprima la terreur, l'incompréhension. Que se passait il ? Pandora recula, et se jeta sur la porte, mettant tout son poids pour qu'elle cède. Tombant à la renverse avec le morceau de bois, elle rampa, lentement jusqu'à son armoire, s'appuyant sur ses genoux pour atteindre la poignée pour enfin atteindre son but. Malheureusement, elle n'eut pas le temps. Un objet lourd s'abattit sur sa tête, l’assommant pour de bon. La jeune femme s'écroula sur la sol. Les yeux grands ouverts, ce qu'elle vit avant de sombrer fut son reflet dans son sang, qui s'écoulait sur le parquet.

Lorsqu'elle rouvrit les yeux, elle était sur un lit d'hôpital, une seringue dans le bras avec une douleur affreuse à l'arrière du crâne. Théodore était donc encore en vie. Elle inspira avec difficulté et vit le vieil homme sur le fauteuil, endormi. Sûrement à cause de l'inquiétude intense qu'il a du ressentir. Pandora se leva, doucement, tentant de faire le moins de bruit possible. L'aiguille de la seringue glissa de son bras, explosant au contact du carrelage. Attrapant quelques affaires que n'avait pas hésité à amener Théodore, elle endossa un jean slim, un débardeur blanc et sa veste en cuir marron. Pieds nus et sûre d'elle, d'un pas titubant, elle s'avança dans le couloir de l'hôpital. Les médecins et patients accouraient dans tous les sens, aucun ne portant un quelconque intérêt à la jeune femme. L’ascenseur fut vite à se disposition et lui permit d'atteindre l'entrée principale en peu de temps. Une fois les portes automatiques passaient, son regard se posa sur la rue et les gens qui défilaient devant elle. Si cette femme asiatique osait se présentait, elle serait prête et lui montrera de quoi elle est capable. Jamais ne sous estimer Pandora.