L'obscurité régnait dans ce couloir où quelques étincelles apparaissaient, suite à la coupure de courant soudaine et non-accidentelle. Ces petits éclairs de lumière exposaient le désastre qui venait de se passer dans ce lieu. De nombreux corps jonchaient le sol, certains beaucoup plus meurtris, d'autres presque méconnaissables. Le sang se répandait lentement sur le sol, suivant la même direction comme si une source l'attirait. Une silhouette se dessinait dans la noirceur de la pièce. Les signaux visuels de l'alarme s'allumèrent, éclairant ce long couloir digne d'un film d'horreur. Une femme marchait à allure normale, esquivant les cadavres qu'elle venait de mettre à terre, sans aucun scrupule, sans aucune pitié. Son regard noir fixait, sans ciller, le bout de ce couloir, comme si elle savait où elle devait se rendre. Elle se moquait d'avoir son jean abîmé par les combats, d'avoir sa peau salit par les luttes incessantes, d'avoir le corps meurtris par les balles et les lames. Des claquements bien audibles rythmaient ses pas. Comment une jeune femme avait elle pu retourner cet endroit, créant un chaos énorme sur son passage ? Elle savait comment, elle avait le remède pour affronter de telles situations. La seule question qui la tourmentait et l'avait poussé à venir jusqu'ici était : pourquoi ? Pandora venait de nouveau de risquer sa vie, s'introduisant dans un immeuble hautement gardé mais cette fois, la raison de cette poussée d'adrénaline était encore bien floue. Elle l'avait à peine rencontré. Juste un regard, dans la rue. Rien de plus. Ce garçon avait animé en elle un sentiment étrange. Il avait quelque chose de familier. L'adolescent venait d'attirer l'attention de Pandora qui, dorénavant, portait à cet inconnu, un bel intérêt.

Tout avait commencé quelques heures avant. Lors d'une excursion en fin d'après midi. Le soleil commençait à disparaître derrière les immeubles, dessinant des ombres immenses sur la petite ville de Gotham. Il était rare que la jeune femme se décide à sortir de son terrier pour se promener dans les rues bondées du centre-ville. Cependant, la baisse impressionnante de sa durée de vie, qu'elle avait constaté peu de temps avant, la poussait à s'ouvrir au monde et découvrir l'inconnu. Cette initiative fut applaudit par son majordome, Théodore, qui n'hésita pas à la conduire en ville. À travers les vitres de la limousine, elle observait les immeubles immenses et imposants, mais aussi la population qui affluait sur les trottoirs de Gotham. Chaque personne présente sur le bord de la chaussée possédait son propre caractère, sa propre gestuelle. Des personnalités intéressantes, lassantes, énervantes. Le monde était peuplé de beaucoup de choses. La longue voiture s’engouffra dans une petite rue de Gotham. C’est à ce moment qu’elle descendit de la voiture, apercevant l’énorme quartier consacré aux piétons, dominés par des magasins des moins au plus extravagants. La porte de la voiture claqua avant de démarrer derechef, s’éloignant de son emplacement. La jeune femme suivit les habitants, découvrant à son tour l’immense place charmante de la ville. Ses pensées étaient, cependant, tournées vers quelques préoccupations qu’elle tentait de chasser, en vain. Puis, elle croisa son regard. Ce garçon, tremblant, assis sur une chaise à la terrasse d’une brasserie. Son regard apeuré ne lâcha pas celui de la jeune femme, devenant petit à petit interrogateur. Quelque chose venait de se passer. Comme-ci ce garçon avait toujours fait partie de sa vie. Comme-ci ce n’était pas la première fois qu’elle le voyait. Alors qu’elle s’avançait dans sa direction, curieuse de savoir qu’il était, il se leva précipitamment, faisant vaciller sa chaise et se mit à marcher d’un pas rapide, se faufilant dans une ruelle étroite. Avant même qu’elle n’est pu imaginer quoi que ce soit, deux hommes la bousculèrent sauvagement, suivant le même chemin que cet étrange garçon.

Un danger rodait, le flaire d’Héléna lui mentait peu. Sans réellement savoir pourquoi, elle suivit les poursuivants, discrètement mais faisant en sorte de ne pas les lâcher d’une semelle. De nouveau, elle s’embarquait dans une histoire sans queue ni tête. Une manipulation sur son portable enclencha une alerte sur le mobile de son majordome. C’est à une intersection qu’elle les vit l’attraper, le rouant de coups pour l’affaiblir. Fronçant les sourcils, elle se mit à courir vers eux, exécutant un magnifique levé de jambe pour assommer l’un des agresseurs. Le second l’attrapa avec force par la taille, la soulevant du sol pour la jeter quelques mètres plus loin. L’atterrissage fut douloureux, ce qui l’empêcha de se relever directement. Il était trop tard, l’homme venait d’embarquer ce garçon à bord d’une camionnette, son collège le rejoignant en se tenant la nuque. Derrière, le klaxon de la limousine résonna. Se redressant avec difficulté sur quelques pas, Héléna se précipita jusqu’à sa voiture, grimpant à bord. Un signe de tête de sa maîtresse lui indiqua qu’il devait suivre la machine devant eux. Cette dernière accéléra, sentant que la jeune femme ne comptait pas abandonner. Après plusieurs tours et passage dans les nombreuses rues de l’immense ville qu’est Gotham, ils s’arrêtèrent, à une intersection, loin des regards des kidnappeurs. Ils venaient de s’arrêter devant un immeuble de plusieurs étages. Regardant à droite, puis à gauche, ils tirèrent le corps endormi de leur proie jusqu’à la porte d’entrée. C’est à ce moment qu’elle sortit de la voiture, intervenant dans l’immeuble. L’ascenseur sonna, indiquant ainsi l’étage où ils comptaient se rendre. Prise dans son élan de justicière, elle poussa violemment la porte des escaliers, les escaladant quatre à quatre. Arrivée à l’étage, elle ouvrit la porte avec attention. Des bureaux, un espace ouvert. Soudain, la porte qu’elle venait de pousser s’abattit sur elle. Les deux hommes l’attendaient, pas seuls.

Après une lutte difficile contre ces malfrats, elle en était là. Dans le couloir qui menait au bureau du directeur, qui ne se souciait sûrement pas que l’un des local de son entreprise servait de boucherie à une bande de gorilles. Son poing s’abattit contre la sonnette d’alarme qui se tut, éteignant les lumières rouges. L’obscurité tombait. Sa main glissa le long du mur, cherchant à tâtons la poignée. Lorsqu’elle la trouva, elle l’abaissa lentement, sans bruit. Dans la pièce dans laquelle elle venait de pénétrer, le garçon était là, replié sur lui-même, dans un coin. Comment la jeune femme devait elle agir face à ce jeune homme pour qui elle était intervenue. La lumière s’alluma, éblouissant la jeune femme qui tomba au sol dans un cri de douleur suite au coup violent qu’elle venait de réceptionner dans sa cage thoracique. Le souffle court, elle dévisagea son agresseur, avant de se soulever lentement du sol, un sourire au coin des lèvres. Un mercenaire. Il ne lui avait pas manqué. Le sérum s’agita dans ses veines. La montée d’adrénaline enclencha son geste. Alors qu’il tentait de lui asséner un autre coup, elle lui attrapa la jambe, la brisant brutalement avant de le laisser tomber au sol, l’attrapant par la gorge qu’elle serra sans hésitation. Le visage de l’homme laissa échapper une grimace de douleur et le craquement audible de sa nuque entre les doigts de la jeune femme fit couler son sang sur ses lèvres. Le corps sans vie tomba sur la moquette beige. Pandora lança un regard à l’inconnu qui s’était réfugié aussi loin qu’il le pouvait d’elle. Souriante, elle plongea ses yeux attendris dans les siens. Des bruits de pas résonnèrent au dessus de leur tête. Ils ne devaient pas rester ici. Soit ce garçon la suivait, soit il restait ici et attendait gentiment qu’on vienne faire de lui un cadavre supplémentaire d’un quelconque gang. La main tendue vers le garçon, elle attendait patiemment sa décision.

Il était là. Juste dans le coin de la pièce. Ses yeux. Ils la dévisageaient. La jeune femme était incapable de donner les raisons pour lesquelles elle se trouvait dans ce bureau, à tendre une main à cet inconnu. La volonté de l’aider était fortement présente. Une part d’elle influait sur son corps, surpassant l’effet mental néfaste du sérum. Pandore perdait son emprise. Si la présence du démon s’était faite plus imposante, ce garçon serait au bord d’une fosse à se faire grignoter par les insectes. Héléna ne voulait pas le laisser mourir, même simplement le laisser entre les mains de ces brutes. Il était difficile de croire que la jeune dealeuse se décidait à jouer les justicières. Cependant, cela était bien réel. S’il ne voulait pas la suivre, elle l’assommerait et le porterait jusqu’en bas de cet immeuble. L’idée de le laisser là lui faisait… de la peine ? Elle ne savait quel mot utiliser pour qualifier le sentiment qu’elle ressentait à la simple évocation de cet abandon. C’est à cet instant que la peau brûlante du jeune homme toucha la paume de sa main. Un long frisson longea son échine, se propageant dans chacun de ses membres. Il y avait anguille sous roche. Ce garçon… Il avait quelque chose à voir avec elle, il n’en était pas possible autrement. Un simple contact avait su la bouleverser. Avalant lentement sa salive, elle l’aida à se relever, ne perdant pas pour autant son le sourire qu’elle lui adressait. D’un pas élégant, elle chevaucha le corps immobile et vide de souffle sur le sol. L’inconnu prononça alors quelques mots. Il la remerciait ? Ce jeune homme ne devait pas être totalement ignorant de la situation dans laquelle ils s’étaient embarqués. Quelqu’un qui lui disait : « Merci ». Avec tout le mal qu’elle faisait autour d’elle, un gamin sortit de nulle part la remerciait d’avoir assassiné une petite dizaine d’hommes pour lui « sauver la vie ». Il était vrai qu’un acte de la sorte venant de sa part n’avait jamais eu lieu. Finalement, tout le monde pouvait laisser paraître un instant de bonté. Ses doigts s’entrelacèrent doucement avec ceux du garçon. Ce dernier devait être plus jeune qu’elle, à vu d’œil, même si sa taille et sa carrure trompaient au premier regard. Des cheveux bruns, aussi sombres que les siens contrastaient avec ses yeux noisettes. Ces critères physiques ne lui étaient pas inconnus, cependant, il lui était difficile dans la situation présente de réfléchir à ce détail. Les de bruits pas devinrent précipités et plus proches. Héléna entraîna le garçon dans le couloir dont le sol était jonché de corps, dorénavant inanimés, qui l’avaient empêché d’atteindre son but. Elle se pencha sur l’un d’eux qu’elle fouilla attentivement pour en retirer une arme. Quelques manipulations lui permirent de savoir qu’elle était chargée. La rangeant contre son bassin, sous la taille de son pantalon. Ses vêtements se transformaient en débris, dévoilant certaines parties de son corps de femme. Le sang, la crasse et la sueur collaient des mèches de cheveux sur son visage. Le pire, c’est que ce n’était pas fini.

Sans crier gare, le sauvé s’adressa à elle, la faisant légèrement sursauter. Que devait-elle garder pour elle ? Allait-il sortir un objet illégal de sa poche et l’utiliser pour les sortir de là ? L’imagination d’Héléna n’était assez souple pour voir plus loin ni anticiper ce qui allait réellement se passer. Le corps du jeune homme se déforma, s’élargissant. Sa peau se tira et se couvrit d’une fourrure d’un noir ébène. Sa taille ne cessait d’accroître tout comme ses membres augmentaient de taille. Des craquement d’os inquiétèrent la jeune femme qui , sous ce spectacle sortit d’un livre de contes, recula, presque terrorisée par le monstre qui se tenait devant elle. Un lycanthrope d’environ trois mètres de haut. Son cœur se mit à vibrer à une allure presque étouffante. Mais pas de peur. Elle sentait qu’elle pouvait faire confiance à cet homme-loup, même si son apparence bestiale l’impressionnait au plus haut point. N’ayant pas le temps de dire quoi que ce soit que la bête l’installa sous son bras gigantesque, avant de s’élancer contre les murs de plâtre. Le fracas que faisait chaque impact l’incitait à protéger sa tête de ses bras en se collant plus près de la bête. Elle ne voyait pas ce qui se passait, sa vue se brouillait à cause de la poussière et de la vitesse à laquelle ils avançaient. Au bout d’un moment, plus aucune pièce ne servirait d’intermédiaire entre deux murs et ça serait la chute. Le mur se brisa mais aucun son direct n’apparut. Juste l’écho des briques tombant des dizaines de mètres plus bas. Le cœur de la jeune femme remonta dans sa poitrine, le pouls accélérant à une vitesse folle. Cette chute sembla durer des minutes. Le loup pivota de manière à la protéger de l’atterrissage violent. Ce dernier se fit en souplesse pour Héléna, mais les dégâts du au choc la laissait douter sur la santé physique de l’animal.

Se laissant glisser du corps de l’immense créature, elle poussa un soupir de soulagement en touchant le sol. Mais elle ne quitta pas leur objectif des yeux. Son mobile s’installa entre ses doigts et un message d’urgence fut envoyé à son majordome. Il n’allait pas tarder à arriver. Lorsqu’elle se tourna pour faire face à l’animal, celui-ci se dressait sur ses pattes arrière, dévoilant l’ampleur visuelle de sa puissance. D’une voix rauque et étrange, il insinua une séparation. La jeune femme lui donna un coup sur la patte, consciente que son geste ne servait à rien : « Je ne sais pas pourquoi je suis venue t’aider. Je ne sais pas pourquoi je veux t’aider. Ne joue pas les héros. Reprend forme humaine et on se casse ». Le regard noir qu’elle lui lançait, annonçait que quoi qu’il arrive, elle allait se faire obéir. Au même moment, les phares de la limousine les éblouirent. De nouveaux bruits d’os craqués lui parvinrent tandis qu’elle avait, dans sa précipitation, ouvert la porte arrière de la limousine. Lorsqu’il fut à bord, elle s’installa près de lui et ordonna à Théodore de les conduire au manoir, le plus discrètement et le plus vite possible. Puis, elle tourna son corps vers le gamin, qu’elle n’hésita pas à enlacer de ses bras, et le serrer contre elle. C’était un comportement bizarre venant d’elle mais depuis qu’elle avait rencontré ce garçon, plus rien n’était normal. Lui caressant le dos avec tendresse, elle murmura : « C’est fini, je suis là ». Elle inspira profondément et reprit la parole : « Je me nomme Héléna Manson ». Un sourire s’afficha sur ses lèvres et une larme perla sur sa joue : « Je ne laisserai personne te faire de mal, plus maintenant ». Sur ces bonnes paroles, elle observa les lumières de Gotham à travers les vitres teintées. Mais qui était ce garçon qu’elle voulait tant protéger ?

Oui, son geste était totalement décalé face à la situation à laquelle elle faisait face. Mais ce garçon semblait si différent. Leur premier contact avait suffit pour déclencher chez la femme un point de non retour. Héléna allait aider ce jeune homme, même si sa vie supportait un danger supplémentaire. Ce n’était pas un problème de plus ou de moins qui allait changer quoi que ce soit à sa situation. La jeune femme possédait déjà les nombreuses marques des conséquences de ses choix. Dernièrement, elle avait subi une attaque directe d’un concurrent. Ce dernier n’avait pas sélectionné son mercenaire au hasard. Cependant, celui-ci ne fit pas longtemps. Sa vie s’écourta aussi vite qu’elle était apparue. Le combat fut pourtant rude et certaines plaies ne se refermaient pas, dévoilant les faiblesses de la dealeuse. Ces blessures ne prenaient guère le temps de cicatriser. Les coups s’abattaient sur son corps comme la pluie. Malgré cet aspect négatif, elle maintenait un ordre dans le bas-fond de Gotham. Le plus petit comme le plus grand des criminels n’osaient la provoquant, craignant la puissance dont elle pouvait faire part grâce à ce mystérieux sérum. Si seulement la jeune femme savait que quelques uns de ses ennemis avaient connaissance de l’existence de ce liquide de force, peut être serait elle plus méfiante à chacune de ses sorties et à chacun de ses actes. Une épée de Damoclès dansait au dessus de sa tête mais les nuages, soufflaient par ses buts principaux, la lui cachait. Refoulant ses pensées, elle se concentra sur la personne assise contre elle.

Ses doigts glissèrent dans la chevelure du dénommé Joshua. Elle l’écoutait, attentivement, ne détournant pas son regard du paysage extérieur. Donc, il se nommait Joshua. Un prénom qui résonna différemment à son oreille. Le second nom propre qu’il prononça lui rappela quelque chose. Oscorp. Un mot qui s’imposait dans son esprit comme une évidence. Où avait-elle déjà vu ce nom ? Ses pensées se mélangèrent, l’empêchant de se concentrer correctement. Relâchant son effort, elle leva le ton, se décidant à répondre aux questions que venaient d’émettre la douce voix de son invité : « Le jour, le mois, l’année. Ici, le temps n’existe que pour les livraisons de drogue. Bienvenue à Gotham, Joshua. Une ville partagée par la criminalité. Dans un coin, la mafia, de l’autre, les fous, puis les charmants vendeurs de drogue, tel que moi. Là, où je t’emmène, personne ne peut t’atteindre. Personne n’ose s’aventurer sur mes territoires. Tu y seras en sécurité. Ce qui se passe ici est dit haut et fort mais l’incapacité de la police est à mourir de rire. Les gens sont sales, de sang et de magouilles. Aucune goutte d’eau n’est fraîche et pure, ici bas ». D’une voix lente, elle termina sa phrase, reconnaissant le chemin qui les menait à sa demeure.

Une fois le moteur coupé, elle descendit, tendant de nouveau sa main à Joshua. Elle l’entraîna alors à l’intérieur de son manoir, lui faisant découvrir une autre partie visuelle de sa grandeur : « Fais comme chez toi. Théodore te servira ». Sur ces mots, le majordome ferma la porte et salua le garçon d’un sourire, l’invitant à s’asseoir sur un des sofa. La jeune femme tourna, lentement dans la pièce : « T’hébergeant sous mon toit, tu vas devoir m’éclaircir sur ses événements hors du commun que nous venons de vivre ».